Le retour d’expérience de La Financière Responsable
Des travaux s’engagent en Europe et aux États-Unis au sujet des normes ESG (Environnemental, Social, Gouvernance) dans le domaine de la gestion d’actifs. La Financière Responsable (LFR) y contribuera en livrant son retour d’expérience. En effet, il y a plus de 10 ans, LFR a marqué une position de pionnier en décidant de créer une base de données ESG, dénommée Empreinte Ecosociale®, pour fonder ses décisions d’investissement sur des données extra-financières chiffrées, suivies dans le temps, et comparables dans l’espace, à l’instar de la démarche existante dans le domaine financier avec les documents comptables. Ce travail était très innovant puisque le but final est de vérifier la cohérence des données ESG avec les données financières lors de l’analyse des entreprises proposées à l’investissement. Il s’agit donc d’aller au-delà de la simple collection de données, mais de trouver une base cohérente de jugement financier et non-financier, montrant ainsi à l’investisseur et l’épargnant l’utilité du caractère « responsable » pour bâtir une vraie performance financière durable.
L’effort de recherche ainsi menée par LFR a de plus été grandement soutenu par les Pouvoirs Publics, avec l’attribution du label Jeune Entreprise Innovante et d’un Crédit d’Impôt Recherche. Pour assurer la solidité du travail, nous avons établi quelques règles fortes :
– Tout d’abord, toutes les données primaires que nous collectons émanent des entreprises elles-mêmes. Ces données deviennent donc incontestables, ne pouvant a fortiori pas être contestées par les émetteurs eux-mêmes ;
– En corollaire, ces données doivent être publiques, pour éviter qu’un caractère confidentiel ne les rende inexploitables ;
– La campagne annuelle de collecte de l’information auprès des entreprises doit être « partenariale » : nous extrayons nous même les données des documents annuels de référence des émetteurs, en les insérant dans un « questionnaire » que nous transmettons pour vérification à la société (information spontanée), tout en lui demandant de le compléter si nécessaire (information assistée). Ce processus est un moment privilégié d’échange avec l’entreprise permettant une bonne compréhension de certains résultats, de partager les définitions retenues, et d’identifier des points de dialogue (politique d’engagement) ;
– Les indicateurs doivent être chiffrés, et les questions fermées, pour réduire la subjectivité de l’information, souvent sujette à de nombreuses interprétations et donc commentaires ;
– Soucieux de retenir une définition des indicateurs claire et reconnue, nous avons utilisé les normes souvent définies sous l’égide des Nations Unies, tant dans le domaine Environnemental que Social ;
– Pour permettre des comparaisons « horizontales », toutes les entreprises détenues en portefeuille à une date donnée sont interrogées, ainsi que celles qui composent les indices à la même date (par exemple, CAC40, Eurostoxx 50, etc.) ;
– Toutes les données recueillies et validées doivent évidemment être conservées dans un endroit aisément accessible et sûr pour permettre les comparaisons « verticales ». Armés de ces règles et de ténacité, nous avons utilisé cette base de données pour fonder le caractère responsable annoncé à nos clients investisseurs, et qui nous légitime auprès des émetteurs.
Après 10 ans de travail, et au moment où le sujet apparaît sur la scène, nous pouvons (et devons) livrer quelques enseignements :
– La formation des acteurs est sans doute l’effort le plus important à entreprendre pour accompagner le développement des normes ESG. Il est, en effet, fait appel à un très grand nombre de notions relevant de disciplines très variées qui ne pourront être utilisées que si elles sont bien comprises ;
– Apparaissent très clairement les différences culturelles nationales, qui doivent rester à l’esprit pour comprendre la limite de l’exercice ;
– La détention d’informations n’est qu’un préalable, fondamental, mais insuffisant. En effet, on ne peut pas se contenter d’une simple juxtaposition des données : il faut savoir les lire. Il convient alors de mettre au point des arguments de déchiffrage pour en tirer une signification utile. Ainsi, à La Financière Responsable, l’utilisation de filtres stratégiques, inspirés des travaux de Michael Porter, a apporté un relief particulier à la donnée ;
– La donnée doit être aisément et intelligemment accessible, lors des travaux d’analyse et de surveillance du portefeuille, et ensuite pour rendre compte clairement à l’investisseur ;
– La relation avec l’émetteur est un élément clé. Pour adhérer au programme, l’émetteur doit connaître et comprendre l’utilisation qui en est faite. La contrainte réglementaire sur les normes ESG seule ne suffira pas à créer le mouvement.
En conclusion, il faut avoir bien conscience qu’il s’agit d’un très long chemin, souvent aride, mais qu’il faut résolument emprunter pour garantir le sérieux de l’investissement responsable.
Achevé de rédiger le 28 septembre 2020
Olivier Johanet, Président de La Financière Responsable