La Financière Responsable a décidé de ne pas investir dans l’action TOTAL pour 3 raisons :
1/ La santé financière de l’entreprise est très sensible aux cours du pétrole.
En effet, la corrélation du cours de l’action TOTAL SA sur les 5 dernières années (2014 à 2018) avec les cours du Brent s’établit à 88%. Le premier segment de la chaine de la valeur, l’amont, qui recouvre l’exploration et la production, a connu une formidable appréciation ces dernières années. De 2016 à 2018, le chiffre d’affaires de cette activité a progressé de 66% quand la marge est passée de -2% à 30% ! Pendant la même période, le prix moyen du baril a progressé de 63% (43,7$ en 2016 v. 71,3$ en 2018). L’excellence opérationnelle de l’entreprise, réelle, ne contribue que de façon limitée à la progression de la marge.
Le second segment de la chaine de la valeur, l’aval, est composé, en première étape, du raffinage et de la pétrochimie. Cette activité est moins sensible que la première au prix du baril. Néanmoins, sur la même période, 2016 à 2018, le chiffre d’affaires augmente de près de 50% ! La marge opérationnelle (6%) quant à elle est tombée à 2%. Cette activité industrielle de transformation de la matière première est en fait également touchée par de nombreux facteurs comme les effets prix issus de la demande finale, alors que les stocks ne permettent pas une réduction immédiate des prix finaux après la baisse des cours, et enfin le poids des coûts fixes (infrastructures, charges de personnel, etc.)
Le troisième métier de TOTAL, le marketing et les services incluant la distribution affiche une progression de chiffre d’affaires (+42% de 2016 à 2018) un peu moins liée au cours du pétrole que les autres activités. La marge est cependant faible (3%), notamment pour ce qui concerne le réseau de distribution (14 000 stations-service) qui est plus une contrainte pour le groupe.
2/ Les cours du pétrole dépendent à long terme fortement de la demande qui est orientée tendanciellement à la baisse.
L’organisation de l’offre, avec notamment l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole comptant 14 pays pour 43% de la production et 72 % des réserves mondiales en 2017), contribue fortement, avec les évènements géopolitiques, aux variations à court terme des cours. A long terme, la variation de la demande est tirée par la santé économique mondiale. A plus long terme encore, l’évolution du mix énergétique mondial joue en défaveur du pétrole.
Par ailleurs, chaque évènement donne lieu à des anticipations des acteurs par l’intermédiaire des marchés dérivés. Ces mouvements spéculatifs amplifient donc la volatilité des prix.
3/ Les investissements de TOTAL dans les énergies nouvelles propres sont encore limités. L’activité de Total dans les énergies à bas carbone (incluant le Gaz Naturel Liquéfié – GNL) se développe, mais sa place dans le chiffre d’affaires du groupe est encore très limitée puisqu’elle n’en représente en 2018 que 7%, avec un résultat opérationnel négatif depuis 3 ans. Les investissements du groupe profitent pour un peu moins des 3/4 à la production-exploration et la pétrochimie et raffinage. Le secteur des énergies propres a certes connu en 2018 une forte hausse avec le rachat des activités GNL d’Engie et de Direct Énergie, mais sa contribution à la création de valeur du groupe est encore peu significative, malgré l’important effort de communication dont il bénéficie.
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En conclusion, cette note, fondée sur l’analyse synthétique de la très abondante documentation relative à TOTAL rédigée par les professionnels de La Financière Responsable, montre que notre travail est bien en ligne avec la recherche d’une gestion à long terme dans le cadre d’un développement durable de l’économie réelle. Elle met en évidence également que nos décisions ne dépendent pas d’injonctions idéologiques ou d’impératifs de rendement indexés sur les grands indices, mais de nos convictions et du mandat confié par nos clients investisseurs.
Achevé de rédiger le 4 novembre 2019 Olivier Johanet / Balthazar Laporte.